Regarder en avant-première le film L’Abbé Pierre de Frédéric Tellier avec Benjamin Lavernhe, Emmanuel Bercot et Frédéric Weis.
Synopsis
Né dans une famille aisée, Henri Grouès a été à la fois résistant, député, défenseur des sans-abris, révolutionnaire et iconoclaste. Des bancs de l’Assemblée Nationale aux bidonvilles de la banlieue parisienne, son engagement auprès des plus faibles lui a valu une renommée internationale.
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Ce film a été présenté en compétition au Festival de Cannes 2023.
Naissance du projet
Avec les producteurs, Frédéric Tellier réfléchissait à un sujet. Ils ont alors évoqué l’abbé Pierre, un sujet pouvant s’inscrire dans le prolongement des précédents films du réalisateur (L’Affaire SK1, Sauver ou périr et Goliath). Il se rappelle : “Je ne cesse de m’interroger sur le sens du mal, et la force de la vie. Sur le conditionnement de nos vies. Pourquoi lui aura de la chance, et lui non. Pourquoi elle souffrira, et pas elle. La solitude, les injustices, sont-elles inchangeables ? Répare-t-on le mal qui nous frappe en pleine figure, ou le transforme-t-on ? Spontanément, des points « m’intéressent » chez l’abbé, au-delà évidemment de l’icône qu’il représente, à commencer par son côté révolutionnaire.”
Cannes 2023
L’Abbé Pierre – Une vie de combats a été présenté Hors Compétition au Festival de Cannes 2023.
Trouver l’angle
La rencontre avec Laurent Desmard (secrétaire particulier de l’abbé pendant 15 ans et président de la Fondation Abbé Pierre), que les producteurs ont présenté au réalisateur, a été décisive : “J’ai passé énormément de temps avec lui. Il m’a raconté des moments, des souvenirs qui ne sont pas dans la « littérature officielle » et qu’il n’avait, je crois, encore confiés à personne. Il m’a ouvert une malle incroyable de souvenirs, d’émotions, de complicités… Il m’a donné à voir et à com- prendre l’abbé Pierre intime, son mode de fonctionnement, ses origines. Et je commence à écrire en m’intéressant au parcours familial, aux échecs, aux doutes de l’abbé”, se rappelle le metteur en scène.
Le choix Benjamin Lavernhe
“On a donc organisé plusieurs sessions de castings avec différents comédiens, dont Benjamin. On leur a fait jouer les discours de l’hiver 54 et du Palais des Congrès. Et d’emblée, j’ai été impressionné par la qualité immédiate et la justesse que proposait Benjamin et je percevais surtout à travers son énergie combien il avait envie du rôle. Et puis il le cachait, mais je voyais son trac, et j’aime cette preuve d’hu- milité. À partir de là, il a fallu jongler avec son emploi du temps à la Comédie-Française mais je suis tellement heureux qu’on y soit parvenu.”
Retrouvailles
Le film met aussi en avant le personnage de Lucie Coutaz, qui fut la secrétaire de l’abbé Pierre, de la Seconde Guerre mondiale jusqu’à sa mort. Un rôle que Frédéric Tellier a confié à Emmanuelle Bercot, qu’il retrouve après Goliath. La comédienne, qui a joué ce personnage sur 40 ans, se souvient : “J’ai pu m’appuyer sur la qualité du travail de prothèses et de maquillage. D’autant plus que les différents essais nécessaires permettent de rentrer peu à peu dans la peau du personnage, de travailler sur la posture, la voix. Mais je ne vais pas mentir, voir son visage vieilli reste quelque chose de vertigineux.”
“Oublie l’obsession de la ressemblance !”
“Il faut évoquer, trouver l’énergie, un geste, une attitude, un regard, passer par soi pour atteindre l’autre, c’est très mystérieux… On ressemble parfois plus à l’autre quand on ne cherche pas à lui ressembler. Je pense cette obsession de ressemblance et pourtant on voit ces personnages. Pour devenir l’abbé Pierre, j’ai d’abord essayé de capter son débit, ce mélange de grande concentration et d’immense colère. Et puis, il y a la phase déterminante des premiers essais maquillage et des questions à Joaquin Phoenix jouant Johnny Cash ou Michel Bouquet, Mitterrand. Ils ne sont pas grimés. Il n’y a jamais chez eux à résoudre. Qu’est-ce qu’on transforme ? Qu’est-ce qu’on garde de moi ? On a ainsi choisi de ne pas modifier mon nez.”
“Car si on voit l’artifice, c’est évidemment pire. Il ne faut pas voir la fabrication, l’effort de l’acteur qui chercherait à trop coller physiquement au personnage. Je suis persuadé que c’est en étant le plus possible connecté à soi-même et à sa propre humanité qu’on sert mieux l’autre.”