SYNOPSIS
Sandra, Samuel et leur fils malvoyant de 11 ans, Daniel, vivent depuis un an loin de tout, à la montagne. Un jour, Samuel est retrouvé mort au pied de leur maison. Une enquête pour mort suspecte est ouverte. Sandra est bientôt inculpée malgré le doute : suicide ou homicide ? Un an plus tard, Daniel assiste au procès de sa mère, véritable dissection du couple.
Palme d’Or du Festival de Cannes 2023
La défaite d’un couple
Avec Anatomie d’une chute, Justine Triet souhaitait faire un film centré sur la défaite d’un couple. L’idée était, pour la réalisatrice, de raconter la chute d’un corps de façon technique et d’en faire l’image de la chute du couple et d’une histoire d’amour : “Ce couple a un fils qui découvre l’histoire de ses parents dans un procès – procès qui dissèque méthodiquement leur relation – et ce garçon passe du stade de l’enfance, incarné par la confiance absolue envers sa mère, à celui du doute.”
“Et le film va regarder ce passage. Dans mes précédents films, les enfants étaient présents, mais n’avaient pas la parole, ils étaient là ; mais on n’avait pas leur point de vue. C’est comme si le moment était venu d’intégrer le regard de l’enfant au récit, de le mettre en balance avec celui de Sandra, le personnage central. Le film est peu à peu devenu comme un long interrogatoire : de la maison au tribunal, ce n’est qu’une succession de scènes où les personnages sont questionnés,” confie Justine Triet.
Retrouvailles
Justine Triet a écrit Anatomie d’une chute pour Sandra Hüller. La cinéaste voulait retravailler avec la comédienne après Sibyl : “J’ai écrit pour elle, elle le savait, c’est une des choses qui m’ont stimulée dès le départ. Cette femme libre qui est finalement jugée aussi pour la façon qu’elle a de vivre sa sexualité, son travail, sa maternité : je pensais qu’elle apporterait une complexité, une impureté au personnage, qu’elle éloignerait totalement la notion de « message ». Et puis, on s’est véritablement rencontré sur le tournage.”
Trouver Daniel
L’interprète de Daniel, l’enfant, a été compliqué à trouver. Justine Triet et sa “collaboratrice au jeu d’acteur” Cynthia Arra ont d’abord effectué un casting d’enfants malvoyants pendant quatre mois. Puis, comme elles ne trouvaient pas, elles ont ouvert le casting aux enfants voyants trois mois supplémentaires, avant de tomber sur Milo : “C’est Jill Gagé (en renfort casting) qui l’a trouvé. Il a tout suite été impressionnant, comme s’il ne jouait pas.”
“Il a appris le piano de manière intensive, et puis, avec Cynthia, on a cherché ensemble le niveau de malvoyance avec l’aide de personnes spécialisées dans la déficience visuelle. Nous avons opté pour une malvoyance qui soit la plus légère possible à incarner, une forte myopie sans atteinte de la vision périphérique. C’est un enfant qui a des capacités intellectuelles et émotionnelles exceptionnelles, avec une espèce de vibration mélancolique.”
Antoine Reinartz VS Swann Arlaud
Antoine Reinartz incarne l’avocat général. Justine Triet l’a choisi pour la modernité qu’il donnait au personnage : “Il amène de l’altérité dans le film, il fait rentrer le monde contemporain et ça casse la solennité poussiéreuse du procès… Il joue en quelque sorte le méchant, mais un méchant très séduisant, retors, flamboyant. Il parle à la place du mort et doit rendre ce dernier, qu’on ne voit pratiquement jamais, attachant, nous faire saisir, comme aux jurés, que cet homme mérite d’être défendu. Antoine apporte une dimension d’arène au tribunal, la violence civilisée du parquet.
Dans la peau de l’avocat de l’accusée, Swann Arlaud joue un personnage assez fragile et sur la défensive : “Je ne voulais pas de combat de coq entre eux. Vincent n’est pas un virtuose du barreau, il est bon mais pas idéalisé. Swann amène une subtilité de jeu, une appréhension, du fait qu’il connaît sa cliente, il se sent du coup plus en danger. Je trouvais intéressant qu’il soit en quelque sorte un double de Samuel, que les deux se ressemblent un peu. On comprend que Sandra et lui se sont connus il y a des années, et qu’il y a entre eux quelque chose de pas totalement éteint”, note la cinéaste.